Mois: juillet 2018

Conférence de Téhéran 1968 : progrès accomplis dans les Droits de l’Homme (Nations Unis)

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La proclamation de Téhéran

Proclamée par la Conférence internationale des droits de l’homme à Téhéran le 13 mai 1968

La Conférence internationale des droits de l’homme,

Réunie à Téhéran, du 22 avril au 13 mai 1968, pour passer en revue les progrès accomplis depuis l’adoption il y a vingt ans de la Déclaration universelle des droits de l’homme, et pour dresser un programme d’avenir,

Ayant examiné les problèmes relatifs aux activités entreprises par l’Organisation des Nations Unies en vue de promouvoir et d’encourager le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales,

Ayant présentes à l’esprit les résolutions qu’elles a adoptées,

Notant que l’Année internationale des droits de l’homme est célébrée à un moment où le monde subit des changements sans précédent dans l’histoire,

Tenant compte des possibilités nouvelles qu’offrent les progrès rapides de la science et de la technique,

Persuadée qu’à une époque où les conflits et la violence règnent dans beaucoup de régions du monde, l’interdépendance des hommes et le besoin de solidarité humaine sont plus évidents que jamais,

Reconnaissant que l’humanité entière aspire à la paix et que la paix et la justice sont indispensables à la pleine réalisation des droits de l’homme et des libertés fondamentales,

Proclame solennellement :

  1. Les membres de la communauté internationale ont le devoir impérieux de s’acquitter de l’obligation solennellement acceptée de promouvoir et encourager le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinions politiques ou autres;
  2. La Déclaration universelle des droits de l’homme exprime la conception commune qu’ont les peuples du monde entier des droits inaliénables et inviolables inhérents à tous les membres de la famille humaine et constitue une obligation pour les membres de la communauté internationale;
  3. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, de même que les autres conventions et déclarations adoptées, dans le domaine des droits de l’homme, sous les auspices de l’Organisation des Nations Unies, des institutions spécialisées et des organisations intergouvernementales et régionales ont établi des normes et des obligations nouvelles auxquelles toutes les nations devraient se conformer;
  4. Depuis l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme, l’Organisation des Nations Unies a accompli d’importants progrès dans la définition de normes relatives à la jouissance des droits de l’homme et des libertés fondamentales et à leur protection. Beaucoup d’instruments internationaux importants ont été adoptés pendant cette période, mais il reste beaucoup à faire pour assurer le respect effectif de ces droits et de ces libertés;
  5. Dans le domaine des droits de l’homme, l’Organisation des Nations Unies a pour principal objectif de permettre à l’humanité d’atteindre un maximum de liberté et de dignité. Pour que cet idéal devienne réalité, il faut que les lois de chaque pays accordent à chaque citoyen — quelles que soient sa race, sa langue, sa religion et ses convictions politiques — la liberté d’expression, d’information, de conscience et de religion, ainsi que le droit de participer pleinement à la vie politique, économique, culturelle et sociale de son pays;
  6. Il faut que les Etats réaffirment leur détermination d’appliquer efficacement les principes consacrés par la Charte des Nations Unies et les autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales;
  7. Les graves dénis des droits de l’homme commis dans le cadre de la politique odieuse d’apartheid, préoccupent profondément la communauté internationale. Cette politique d’apartheid, condamnée comme un crime contre l’humanité, continue de troubler sérieusement la paix et la sécurité internationales. Il est donc impérieux que la communauté internationale utilise tous les moyens possibles pour extirper ce fléau. La lutte contre l’apartheid est reconnue comme légitime;
  8. Il faut que les peuples du monde soient pleinement informés des maux qu’engendre la discrimination raciale et s’unissent pour les combattre. Mettre en oeuvre le principe de non-discrimination, principe inscrit dans la Charte des Nations Unies, dans la Déclaration universelle des droits d’homme et dans d’autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, est pour l’humanité une tâche de la plus grande urgence, tant sur le plan international que sur le plan national. Il faut condamner et combattre toutes les doctrines fondées sur la supériorité d’une race et sur l’intolérance raciale;
  9. Huit ans après la Déclaration de l’Assemblée générale sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, les problèmes du colonialisme continuent à préoccuper la communauté internationale. Il est urgent que tous les Etats Membres coopèrent avec les organes compétents de l’Organisation des Nations Unies afin que soient prises des mesures en vue d’appliquer pleinement cette Déclaration;
  10. Le déni massif des droits de l’homme qui résulte de l’agression et des conflits armés, aux conséquences si tragiques, cause d’indicibles détresses humaines et engendre des réactions qui pourraient plonger le monde dans des conflits toujours croissants. Il incombe à la communauté internationale de coopérer pour éliminer de tels fléaux;
  11. Le déni flagrant des droits de l’homme qui résulte de mesures discriminatoires fondées sur la race, la religion, la croyance ou l’expression d’une opinion outrage la conscience humaine et met en péril les fondements de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde;
  12. L’écart croissant qui sépare les pays économiquement développés des pays en voie de développement fait obstacle au respect effectif des droits de l’homme dans la communauté internationale. La Décennie du développement n’ayant pu atteindre ses modestes objectifs, il est d’autant plus impérieux que chaque nation, selon ses moyens, fasse le maximum d’efforts pour combler cet écart;
  13. Les droits de l’homme et les libertés fondamentales étant indivisibles, la jouissance complète des droits civils et politiques est impossible sans celle des droits économiques, sociaux et culturels. Les progrès durables dans la voie de l’application des droits de l’homme supposent une politique nationale et internationale rationnelle et efficace de développement économique et social;
  14. L’existence de plus de 700 millions d’illettrés dans le monde est un obstacle énorme à tous les efforts que l’on fait pour réaliser les objectifs et les buts de la Charte des Nations Unies et les dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Il faut envisager d’urgence une action internationale pour éliminer sur toute la surface de la terre l’analphabétisme et promouvoir l’enseignement à tous les échelons;
  15. Il faut mettre fin à la discrimination dont les femmes sont encore victimes dans diverses régions du monde. Le maintien de la femme dans une situation d’infériorité est contraire à la Charte des Nations Unies comme aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’homme. La pleine application de la Déclaration sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes est nécessaire au progrès de l’humanité;
  16. La protection de la famille et de l’enfance reste la préoccupation de la communauté internationale. Les parents ont le droit fondamental de déterminer librement et consciemment la dimension de leur famille et l’échelonnement des naissances;
  17. Il faut encourager au maximum les jeunes dans leurs aspirations à un monde meilleur, où les droits de l’homme et les libertés fondamentales seront pleinement appliqués. Il est impérieux que la jeunesse contribue à forger l’avenir de l’humanité;
  18. Si les découvertes scientifiques et l’évolution de la technique ont récemment ouvert de vastes perspectives au développement économique, social et culturel, ces progrès peuvent néanmoins mettre en danger les droits et libertés de l’individu et requièrent donc une attention vigilante;
  19. Le désarmement libérerait d’immenses ressources humaines et matérielles, actuellement consacrées à des fins militaires. Il faudrait mettre ces ressources au service des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Le désarmement général et complet est l’une des plus hautes aspirations de tous les peuples;

En conséquence,

La Conférence internationale des droits de l’homme,

  1. Affirmant sa foi dans les principes de la Déclaration universelle des droits de l’homme et des autres instruments internationaux adoptés dans ce domaine,
  2. Adjure tous les peuples et tous les gouvernements de se faire les défenseurs des principes proclamés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et de redoubler d’efforts pour que tous les êtres humains puissent, dans la liberté et la dignité, s’épanouir sur le plan physique, mental, social et spirituel.

 

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L’Eglise Catholique et les Droits de l’homme

Dans son encyclique Pacem in Terris, Jean XXIII reprend le contenu de cette Déclaration dans son premier chapitre. Il écrit ainsi: “tout être humain est une personne, c’est-à-dire une nature douée d’intelligence et de volonté libre. Par là même, il est le sujet de droits et de devoirs, découlant les uns des autres ensemble et immédiatement de sa nature: aussi sont-ils universels, inaliénables”. ( Pacem in Terris, paragraphe 9)

L’Eglise catholique a longtemps combattu les anciennes déclarations des droits. Si elle s’est ralliée à celle de 1948, c’est pour trois raisons principales. La première est l’inscription dans son article 18 de la liberté de pensée, de conscience et de religion. Cette inscription, acceptée à titre de compromis par l’URSS après la guerre, a servi de levier aux Eglises d’Europe de l’Est pour résister aux pouvoirs communistes durant l’après-guerre. C’est au nom de ces libertés et de celle d’association que Solidarnosc a défendu les Polonais et en particulier les ouvriers dans les années 1970-1980. Les libertés de conscience et de religion sont sacrées. Elles ne sont en rien le fruit d’une pensée libertine.

La seconde raison est la mise en valeur, par la Déclaration, des droits de la famille, en particulier à l’article 16. Il est précisé “qu’à partir de l’âge nubile, l’homme et la femme sans aucune restriction quant à la race, la nationalité ou la religion ont le droit de se marier et de fonder une famille”. Cet article a toujours été combattu par les intégristes de tous acabits. Il est inséparable de la liberté de conscience et de religion, et n’a rien à voir avec un droit au mariage pour tous que revendiquent certains courants politiques. Attribuer à la Déclaration des tendances libertines, c’est la confondre avec l’usage abusif qu’en font certains cercles occidentaux pour leur propre discours.

La dernière raison de l’acceptation par la papauté de ce texte est la prise en compte de la dimension sociale de la personne à travers les droits économiques et sociaux et les droits civiques: droit au travail, droit à la propriété privée, droit à un salaire équitable, droit d’association, droit de prendre part aux affaires publiques…Ces droits étaient demandés au départ par les pays communistes et refusés par les Etats-Unis. On doit aux rédacteurs de la Déclaration ce bon compromis qui ne s’inscrit pas dans un individualisme occidental exacerbé.

Enfin confondre la Déclaration avec la recherche du bonheur individuel, c’est oublier la réciprocité des droits et de devoirs inscrite dans le texte à l’article 29. Le respect des droits d’autrui signifie autant de devoirs pour les personnes. Jean XXIII le rappelle dans son encyclique: “chez l’homme, leur sujet, les droits sont liés à autant de devoirs”. (Pacem in terris, paragraphe 28)

Cette intégration des droits de l’homme dans Pacem in Terrisest peu connue des catholiques. Elle confirme la dimension universelle de la Déclaration de 1948. La défense de la dignité infinie des personnes, sur la base de ce texte, est une obligation pour les catholiques qui est plus actuelle que jamais.

La planification familiale, un droit de l’homme !

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Avez-vous entendu parler de la « Journée mondiale de la population «

Elle a pourtant été fixée au 11 juillet 2018 !

Et la Conférence de Téhéran ?

 

Une clinique de santé sexuelle et reproductive au Viet Nam. Le pays a étendu ses services de santé en matière de reproduction, notamment la planification familiale, les soins prénatals et postnatals et la prévention du VIH. Photo FNUAP/Doan Bau Chau

La Journée mondiale de la population a été instaurée en 1989 par le Conseil d’administration du Programme des Nations Unies pour le développement, suite au grand intérêt suscité par la « Journée des cinq milliards » célébrée le 11 juillet 1987. Son objectif est d’attirer l’attention sur l’urgence et l’importance des questions de population.

Par la résolution 45/216 de décembre 1990, l’Assemblée générale des Nations Unies a décidé de maintenir la Journée mondiale de la population afin de renforcer la sensibilisation aux questions de population, notamment leur lien avec l’environnement et le développement. Depuis lors la Journée mondiale de la Population est commémorée annuellement dans de nombreux pays par les bureaux du Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA) ainsi que d’autres organisations et institutions, en partenariat avec les gouvernements et la société civile.

Le Thème 2018 :
« La planification familiale fait partie des droits de l’homme »

Tout au long de l’histoire de l’humanité, les efforts pour planifier, éviter ou retarder la grossesse ont été une lutte privée endurée par les femmes et les filles. Aujourd’hui, les choses ont changé : lors de la Conférence internationale sur les droits de l’homme de 1968, la planification familiale est devenue une obligation en matière de droits de l’homme de tous les pays, gouvernements et décideurs politiques.

Le document final de la conférence, connu sous le nom de Proclamation de Téhéran, a déclaré sans équivoque: « Les parents ont le droit fondamental de déterminer librement et consciemment la dimension de leur famille et l’échelonnement des naissances ».

Enchâssée dans ce langage législatif, une prise de conscience a eu lieu : les femmes et les filles n’ont pas à subir l’épuisement, ni le danger de grossesses trop nombreuses et trop rapprochées. Les hommes et les femmes ont le droit de choisir à quelle fréquence embrasser la parentalité – ou même d’y renoncer. Chaque individu a le droit de déterminer la direction et la portée de son avenir de cette manière fondamentale.

Neuf normes pour défendre le droit de l’homme à la planification familiale

  • Non-discrimination :Les informations et services de planification familiale ne peuvent être restreints en fonction de la race, du sexe, de la langue, de la religion, de l’appartenance politique, de l’origine nationale, de l’âge, du statut économique, du lieu de résidence, du handicap, de l’état civil.
  • Disponibilité :Les informations et moyens de contraception doivent être disponibles en quantité suffisante, avec une variété suffisante, pour répondre aux besoins de tous.
  • Accessibilité :Les pays doivent veiller à ce que les produits et services de planification familiale soient accessibles à tous. Cela signifie que les services et l’information doivent être physiquement accessibles et abordables.
  • Acceptabilité :Les services et l’information en matière de contraception doivent être fournis de manière digne, en respectant à la fois l’éthique médicale moderne et la culture des personnes recevant ces services.
  • Qualité :Les informations sur la planification familiale doivent être clairement communiquées et scientifiquement précises.
  • Prise de décision éclairée :En matière de reproduction, chaque personne doit être habilitée à faire ses choix en toute autonomie, sans pression, contrainte ou fausse déclaration.
  • Vie privée et confidentialité :Tous les individus doivent jouir du droit à la vie privée lorsqu’ils recherchent des informations et des services de planification familiale.
  • Participation :Les pays ont l’obligation d’assurer la participation active et informée des individus aux décisions qui les concernent, notamment sur les problèmes de santé.
  • Responsabilité :Les systèmes de santé, les systèmes éducatifs, les dirigeants et les décideurs doivent être responsables des efforts déployés pour réaliser le droit de l’homme à la planification familiale.
  • Source UNFPA
  • 2018, c’est le 50e anniversaire de la Conférence internationale des droits de l’homme de 1968, où la planification familiale a été, pour la première fois, reconnue mondialement comme un droit de l’homme. La Proclamation de Téhéran stipule que « les parents ont un droit humain fondamental de déterminer librement et de manière responsable le nombre et l’espacement de leurs enfants ».
  • La Conférence a également adopté la résolution XVIII intitulée « Aspects des droits de l’homme de la planification familiale », qui relie ce droit à « la dignité et la valeur de la personne humaine » et note la relation entre l’accès à la planification familiale et la condition féminine.

 

En Guinée, par exemple
Le directeur national de Population et de Développement, Mohamed Sano, déplore que un demi-siècle après la déclaration de Téhéran, la planification familiale comme droit de l’homme est sous pression et soumise à plusieurs attaques notamment la limitation de l’accès à l’éducation, à l’information et aux services de la planification familiale.

Or, explique-t-il, un plus grand accès à la planification familiale, sauverait annuellement de dizaines de milliers de vies en évitant des grossesses non désirées, réduirait le nombre d’avortement et diminuerait sensiblement l’incidence de décès et d’handicaps liés aux complications des grossesses et de l’accouchement.

En Guinée, note le directeur national de la Population et de Développement (DNPD), la politique nationale de la reproduction consacre une place capitale à la Planification familiale dans la lutte contre la mortalité maternelle et mortalité infantile.

Mais … La conférence de Téhéran, vous en avez entendu parler ?

Voir la page : Conférence de Téhéran en Avril-Mai 1968