Mois: février 2017

Et si on faisait de nos communes des espaces de solidarité citoyenne ?

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Trémargat, bel exemple de commune solidaire et citoyenne ?

29 déc. 2016

Petite commune rurale nichée dans l’arrière-pays breton, le Kreiz Breizh, un pays de landes et de bois caillouteux, un des coins les plus pauvres de la péninsule, la petite commune de Trémargat, perdue au fin fond des Côtes d’Armor, n’en finit pourtant pas de faire parler d’elle. Mise en exergue dans les années 1960 comme un symbole de ces bourgs ruraux exposés à un exode rural inéluctable, passée de 269 habitants en 1962 à 152 seulement en 1990, la petite commune bretonne a pourtant réussi à remonter la pente et fait la une de nombreux médias, de Rue89 à La Croix en passant par Basta ! le magazine associatif militant du net.

Yvette Clément, maire de la commune, au Tremargad Kafé (photo H. Ronné / La Croix)

Yvette Clément, maire de la commune, au Tremargad Kafé (photo H. Ronné / La Croix)

Ce nouvel élan doit beaucoup à l’installation de plusieurs couples de néoruraux, des anciens soixante-huitards venus s’installer ici pour élever des chèvres dans une logique totalement opposée à l’agriculture intensive alors en vogue en Bretagne. C’est le cas de la maire actuelle, Yvette Clément, arrivée ici en 1976 avec son mari François, avec qui elle a développé, sur les terres pauvres de ce pays boisé et vallonné, un élevage qui compte 150 brebis aujourd’hui.

Malgré l’exode rural il reste désormais 14 exploitations agricoles en activité à Trémargat et les nouveaux arrivants ont fait mieux que s’intégrer : ils ont réussi à redynamiser complètement le petit village breton devenu une vitrine de la gestion participative, au même titre que la commune de Saillans dans la Drôme !

Le tournant date de 1995. Jusque là, la mairie était traditionnellement aux mains de la même famille de génération en génération et son rôle principal se limitait à entretenir la voirie municipale. Mais « à quoi bon mettre des pavés s’il n’y a personne pour les lancer ? » s’est dit Eric Hamon autour de qui s’est agrégée une petite équipe de nouveaux venus débordant d’idées pour faire revivre le petit village sur le déclin en aidant à accueillir de nouveaux agriculteurs et des randonneurs venus profiter de ce coin de nature préservée. Leur slogan : « Vivre, participer et accueillir dans un environnement préservé et de qualité ».

Mais c’est surtout leur méthode qui a révolutionné la vie du village. Depuis cette date en effet, chaque maire ne fait qu’un seul mandat mais reste dans l’équipe suivante pour faire profiter les autres de son expérience. Et les élus ne sont pas les seuls à s’investir : le programme fait l’objet d’un débat public avant les élections et tout est discuté en commission extra-municipale, ce qui permet à chacun de s’investir réellement dans la gestion des affaires publiques. Et quand on parle d’investissement, cela va jusqu’à mettre la main à la pâte…

La place centrale de Trémargat, réaménagée par ses habitants (photo C. Guillou / Rue89)

La place centrale de Trémargat, réaménagée par ses habitants (photo C. Guillou / Rue89)

C’est ainsi que la petite place devant l’église a été entièrement refaite par les habitants volontaires eux-même. Le projet initial conçu par un bureau d’étude et qui faisait la part belle au goudron avec bordure en ciment et mobilier urbain classique, a été abandonné et chacun s’est retroussé les manches pour transformer la petite place en un théâtre de verdure engazonné avec pergola en bois construite localement et arbres fruitiers, le tout pour une somme dérisoire !

Devant le Tremargad Kafé (photo M. Guyonvarch / Basta !)

Devant le Tremargad Kafé (photo M. Guyonvarch / Basta !)

En 1995, un des premiers actes de l’équipe municipale fraîchement élue a été de racheter le café du village en pleine décrêpitude et sur le point de fermer alors qu’il n’y avait déjà plus décole au village et que l’unique épicier partait en retraite. Il fallait donc impérativement conserver un lieu de vie où se retrouver et c’est ce qu’est devenu depuis le « Trèmargad Kafé ». La municipalité en a profité pour aménager deux logements sociaux à l’étage et à transformé l’ancien commerce sur le déclin en un café multiservice avec gîte d’étape attenant. C’est désormais une association qui a repris le flambeau depuis 2008, mais le café est devenu le centre de la vie sociale du village, avec soirées tarot, débats animés et concerts variés.

Dans l'épicerie du village (photo M. Guyonvarch / Basta !)

Dans l’épicerie du village (photo M. Guyonvarch / Basta !)

Quant à l’épicerie, c’est aussi la mairie qui a pris le taureau par les cornes en préemptant une maison qui se libérait dans le centre bourg. Une petite étude de marché a confirmé que les habitants ne voulaient pas du tout d’une supérette qui vende les mêmes produits qu’en grande surface, deux fois plus cher, mais au contraire des produits bio issus majoritairement des exploitations locales. Les vendeurs sont des bénévoles qui se relaient pour tenir la boutique moyennant un accès aux produits à prix coûtant. Il fallait un chiffre d’affaire de 30 000 € pour équilibrer le budget et dès la première année en 2013, il s’est élevé à 75 000 € : un vrai succès !

Depuis 2012, la commune a rompu son contrat avec EDF pour l’alimentation électrique municipale et est désormais abonnée chez Enercoop, ce qui lui garantit, pour un prix à peine supérieur, une énergie 100 % renouvelable et a du coup incité la coopérative bretonne à installer symboliquement à Trémargat son siège social.

Le village de Trémargat a désormais tout du laboratoire pratique de mise en œuvre des démarches de solidarité, de démocratie participative et d’écologie citoyenne. La quasi totalité des exploitants agricoles sont adhérents du Centre d’étude pour le développement d’une agriculture plus autonome (Cedapa), qui prône une agriculture durable, à l’herbe, sans intrant et à taille humaine. A Trémargat désormais, presque tout est bio, même le restaurant qui offre chaque jour pour 12 € un menu à base exclusive d’ingrédients produits localement à partir de l’agriculture biologique. Seuls deux agriculteurs récalcitrants restent adeptes des schémas traditionnels ultra-productivistes, mais du coup on ne les voit jamais au bourg, qu’ils traversent, dit-on, en 4 x 4.

Elevage à Trémargat (photo C. Guillou / Rue89)

Elevage à Trémargat (photo C. Guillou / Rue89)

Reste néanmoins à assurer l’avenir de la commune maintenant que les premiers néo-ruraux installés dans les années 1970 commencent à partir en retraite. Pour cela, le petit village de 200 habitants n’a pas hésité à se lancer dans l’élaboration d’un PLU (Plan local d’urbanisme), un exercice réservé habituellement aux communes de plus grande taille. Une quarantaine de parcelles ont ainsi été rendues constructibles et la mairie en a profité pour protéger les zones humides et les haies bocagères, et empêcher certains travaux de labour.

Mais les habitants ont souhaité aller plus loin encore et c’est ainsi qu’est née l’idée d’une société civile immobilière, dans laquelle la commune et les habitants pourraient prendre des parts et qui achèterait des terres. Financée par 140 associés, venus parfois de l’extérieur, détenteurs d’une ou plusieurs parts à 100 €, la SCI a ainsi acquis une parcelle de 21 hectares sur la commune voisine pour faciliter l’installation d’un couple de jeunes éleveurs qui était à la recherche de pâturage pour ses brebis allaitantes et ses vaches laitières.

« La ferme de 21 hectares d’un agriculteur partant à la retraite était à vendre 65 000 €. La SCI l’a achetée, pour la louer au prix de 100 € l’hectare par an. Il n’y a aucun risque, car si l’exploitation ne marche pas, la SCI peut louer à nouveau les terres », explique l’un des trois gérants de la SCI. Appuyée par la commune, via une association de soutien, la SCI aide actuellement un jeune couple de maraîchers bio à s’implanter et soutient l’agrandissement d’un boulanger-paysan. « Cette nouvelle acquisition se fait sans emprunt bancaire grâce au capital collecté, notamment auprès d’habitants de Saint-Brieuc, séduits par notre démarche et désireux de trouver des produits frais de qualité sur leur marché », ajoute le gérant.

Discussion au Tremargad Kafé (photo M. Guyonvarch / Basta !)

Discussion au Tremargad Kafé (photo M. Guyonvarch / Basta !)

A Trémargat, tout n’est pas idyllique, comme l’explique à Basta ! une jeune agricultrice, membre du conseil municipal : « Ça ne se fait pas tout seul. Il y a des clashs, des désaccords, des débats interminables, des projets qui n’aboutissent pas, des gens qui ne participent pas. Mais dans l’ensemble ça fonctionne. Car la plupart des gens vivent là, partagent un même état d’esprit et sont emportés par cette dynamique collective. Ça donne envie de s’impliquer à son tour. »

Se concerter, décider et agir ensemble : à Trémargat, c’est devenu un réflexe. D’autres communes voisines s’intéressent à la démarche et tentent de copier le modèle : pourquoi-pas à Carnoux aussi ?

L.V.

Nous, les Enfants de prêtres, si souvent cachés !

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Nous, les Enfants de prêtres

Alors que l’institution catholique préfère ne pas savoir, ils sont nombreux à se plier à la loi du silence. Pour L’Express, pourtant, quelques-uns ont accepté de témoigner.

L’air appliqué, un petit garçon métis fait ses devoirs sur la table de la salle à manger. De l’autre côté du couloir, Sophie, la mère, est là, dans la cuisine qu’elle a repeinte en jaune canari, comme un défi à la grisaille des Vosges. Elle raconte les premiers rendez-vous dans un café, les escapades en amoureux. « Très vite, il m’a demandé: Qu’est-ce qui te ferait plaisir? Je lui ai répondu: un bébé. Il a dit: d’accord! »

Un frôlement derrière la porte. C’est lui, Matthieu, son fils de 10 ans. Il file comme un artiste en coulisses qui n’oserait pas entrer sur scène. Pas besoin de lui dire ce que sa mère raconte. Il connaît l’histoire depuis toujours. Son papa est un prêtre. Un homme de Dieu, qui a préféré ses paroissiens à ce gosse à fossettes et à sa mère antillaise qui rit fort. « Pendant la grossesse et l’accouchement, il était toujours là près de moi, raconte-t-elle. J’étais comblée. Mais après la naissance, il a disparu plusieurs jours. Et, depuis, il n’est jamais revenu vivre avec nous. Il dit qu’il a des engagements à tenir. Et son fils, alors? Moi, je fais tout toute seule, j’en ai marre. »

Les tourments de l’Irlande

L’Eglise irlandaise n’en finit plus de payer ses lourds secrets. Depuis une quinzaine d’années, des révélations fracassantes ébranlent la confiance de la population (3,8 millions d’habitants) envers l’institution religieuse: dignitaires du clergé vivant maritalement, scandales sexuels et, surtout, multiples affaires de pédophilie impliquant des prêtres et des moines. En 1992, la presse révèle qu’Eamonn Casey, le très populaire évêque de Galway, a un fils de 17 ans, né d’une liaison avec une Américaine. Pour entretenir sa progéniture, le prélat a même pioché dans le denier du culte.
L’émoi est considérable, Casey démissionne et quitte le pays, ses paroissiens refusent de lui jeter la pierre. L’opinion sera moins compréhensive, l’année suivante, en apprenant que le père Michael Cleary, porte-parole très rigoriste de l’Eglise, avait, lui, … deux fils cachés. «Dans les années 1990, le fossé s’est creusé entre une Eglise aux positions très conservatrices et une société plus urbaine, en plein boom économique et en quête d’émancipation, explique Jean Guiffan, historien spécialiste de l’Irlande. La révélation de toutes ces affaires a accéléré le processus de défiance.»
Dans un pays catholique à 90%, où l’avortement est toujours interdit, où le divorce et le libre recours à la contraception ne datent que de 1995, la succession de cas d’abus sexuels sur des enfants commis par des religieux va tourner à l’affaire d’Etat. Le gouvernement Reynolds sera contraint à la démission en 1994, pour avoir volontairement retardé l’extradition de Brendan Smyth, un prêtre pédophile, vers l’Irlande du Nord, sous domination britannique. Depuis, des milliers d’Irlandais ont porté plainte, affirmant avoir subi dans leur jeunesse des mauvais traitements et des violences sexuelles dans les orphelinats, pensionnats et écoles tenus par les congrégations religieuses. Une commission d’enquête sur le sujet, créée en 2001, est en train d’exhumer des affaires remontant jusqu’aux années 1940. Plus d’une centaine de membres du clergé ont déjà été condamnés pour abus sexuels sur des mineurs.
Un fonds d’indemnisation de près de 500 millions d’euros, abondé par l’Etat et les ordres religieux, a été débloqué pour les victimes. Malgré un Mea culpa officiel en 2003, l’Eglise catholique d’Irlande, toujours omniprésente dans le système éducatif et les hôpitaux, voit ses fidèles se tourner vers d’autres chapelles. Parmi leurs priorités dans la vie, les Irlandais classent désormais les soirées télé et les sorties au pub avant la fréquentation de la messe dominicale.
par Boris Thiolay  Auteur

Quand Matthieu avait 1 an, l’évêque a convoqué le prêtre, Sophie et leur bébé. «Es-tu le père de cet enfant? » a demandé le prélat au curé. « Non, a-t-il répondu !» Il aura fallu que la mère célibataire porte l’affaire devant le tribunal des affaires familiales pour que le père reconnaisse l’enfant, en 2002. Depuis, le diocèse a envoyé ce prêtre quadragénaire officier à 100 kilomètres de chez eux. Mais sans lui demander de remettre sa charge. La porte s’ouvre. Matthieu tourne et retourne autour de la table de la cuisine en tapant dans un ballon. « Mon père ne tient jamais ses promesses, il n’est jamais là quand on a besoin de lui, lâche le garçon dans un souffle. Moi, ce que j’attends, c’est pas des cadeaux, c’est son amour, ça vaut de l’or, son amour. » Regard muet de la mère. « Et je voudrais dire autre chose, reprend le petit: il a gâché mon enfance, mais il ne gâchera pas ma vie. »

Matthieu et sa mère vivent à deux pas de l’église de leur village. Sophie, peintre amateur, se charge des factures et du loyer. Dans un coin de la pièce, l’ordinateur attend que le père l’emporte chez le réparateur. Quand le prêtre passe, c’est toujours en coup de vent, les bras chargés de victuailles et de vêtements pour son fils. De temps en temps, il va le chercher à l’école. Ensemble, ils parlent de foot ou de son carnet de notes. Ça tombe bien: Matthieu est un crack. « Mon père, il vient toujours après la bataille, s’énerve le gosse en montrant fièrement son cahier sans ratures. Je travaille comme un fou pour devenir ingénieur plus tard; parfois je me couche à 22 heures à cause de ça, et lui, il vient juste pour signer le bulletin ! Ce père-là, c’est comme un médicament contre le rhume: ça soigne un peu, mais avec des effets secondaires. » A force d’entendre sa mère tempêter contre ce paternel toujours absent, Matthieu s’est fabriqué un langage d’amour, où les mots de sa mère se mêlent à ses expressions d’enfant. « Pour moi, dit-il, ce qu’a fait mon père, c’est comme une chose de la vie qu’il faut assumer. »

Combien sont-ils, ces fruits de la «chaire» qui ont grandi dans le silence, le mensonge ou la honte? Impossible à dire. L’association Plein Jour, créée en 1996 par des «amies» de prêtres, a été contactée par plus de 300 femmes. Beaucoup sont tombées amoureuses très jeunes. Les plus âgées ont noué leur destin chez leurs parents, ou à la messe. Les autres, aux Journées mondiales de la jeunesse, parfois sur Minitel. Un rendez-vous par-ci par-là, quelques week-ends, des vacances pour les plus vernies. Bien peu d’enfants nés de ces amours clandestines acceptent de témoigner. Même pour dénoncer l’hypocrisie d’une Eglise catholique qui pratique le double langage, interdisant tout en fermant les yeux sur ses curés « volages ».

Pour Marc Bradfer, c’était parler ou sombrer. A 15 ans, ce fils d’une famille de huit enfants apprend que son père, décédé quelques années plus tôt, appartient à la caste ignominieuse des prêtres défroqués. Vingt ans plus tard, cet homme, qui ne se sent pas la force de fonder un foyer, livre son secret dans un récit autobiographique, « Fils de prêtre » (Editions Elytis). Il s’attarde sur la culpabilité brûlante qui a broyé sa famille d’une génération à l’autre, comme une malédiction. « Notre mère répétait souvent: Ma faute, ma très grande faute.? Au cours d’une dispute, elle a balancé la vérité à l’une de mes soeurs, qui avait 14 ans, pour atteindre mon père. Ma soeur lui a répondu: T’en as bien voulu, du curé. »»

C’est vrai qu’elle en a bien voulu, Jacqueline, de ce curé du Nord qui lui avait proposé de s’enfuir avec lui à Toulouse. La jeune chanteuse de la chorale de l’église de Fourmies avait suivi son amant. Le couple s’est marié en 1944. Mais la belle histoire a tourné au duel à la Bernanos, tous deux se reprochant mutuellement d’avoir séduit l’autre. Dans la maison, l’atmosphère est devenue insoutenable. Marc, le septième enfant, a fait des « petites » tentatives de suicide. L’un de ses frères est allé jusqu’au bout. Il s’est tué à 20 ans.

Chez Luc, c’est d’abord le regard, noir comme la réglisse, qui accroche. Puis le visage taillé à la serpe, dont les lignes se brouillent quand il évoque un épisode du passé qui fait mal. Il a 5 ans lorsque sa mère lui révèle que son père porte l’habit. Elle lui parle de cet amour fou qui l’a liée à ce brillant intellectuel dominicain, de vingt ans son aîné. Les mensonges, les hypocrisies de l’institution, Catherine les garde pour elle. Elle n’évoque pas non plus les trois frères de la congrégation venus rendre visite à ses parents peu après son accouchement pour leur demander de garder le silence, « en bons chrétiens». Elle « lègue » le secret familial à son fils, avec le mode d’emploi: « Pour les catholiques, un prêtre ne peut pas avoir d’enfants, alors à eux, il ne faut pas le dire, tu sais. Les autres peuvent savoir. » Pas la peine d’en rajouter: Luc a tout compris. Lorsqu’une tête inconnue se présente à la maison, il se tourne vers sa mère en chuchotant: « Et à celui-là, on peut le dire? »

L’enfant a si bien compris qu’il grandit sans poser de questions. Quand à l’enterrement de sa grand-mère paternelle – qu’il a vue de temps en temps – la famille le présente aux amis éloignés comme «un neveu», il encaisse. Il encaisse encore lorsqu’un jour, au cours d’une randonnée en groupe, son père fait mine de ne pas entendre lorsqu’il lui lance: « Papa, attends-moi! » Chaque fois qu’un pépin lui tombe dessus, le gamin ne peut s’empêcher de se dire qu’il « paie » pour le péché dont il est l’incarnation. Mais il se tait. Il aime son père.
A l’école, en revanche, il lâche tout. Le prêtre l’interprète comme un appel au secours et le fait venir près de lui. Luc reste un an dans la communauté qu’il a fondée dans un quartier déshérité du nord de la France. Il dîne en compagnie des frères et s’endort sur l’Evangile de Matthieu, que son père lui lit tous les soirs. Dehors, l’enfant croise des clochards, des femmes battues, des alcooliques. Une vraie cour des malheurs dans laquelle son père, fils de la haute bourgeoisie, se démène corps et âme. « Je me suis dit que mes soucis ne devaient pas peser beaucoup à côté de tout ça », soupire Luc. Pourtant, entre ce père isolé dans son monde et ce fils en mal d’autorité, quelque chose s’échange. Une ferveur, qui permettra à Luc de pardonner. Beaucoup plus tard. « Je ne lui en ai jamais voulu d’être un homme de conviction, dit-il aujourd’hui. Il y a toujours eu beaucoup d’amour entre nous. Mais nous sommes comme deux étrangers. »  A 38 ans, divorcé, endetté, Luc se reproche d’avoir manqué de « rigueur » dans sa vie. Croit-il toujours en Dieu? « Je suis agnostique. Adorer quelqu’un qu’on n’a jamais vu, moi, ce n’est pas mon truc. »

Il fait beau sur Caen. La table est dressée dans le restaurant préféré d’Olivier, au pied du château de Guillaume le Conquérant. « Olive », la trentaine, une dégaine un peu baba cool, n’aime pas parler de lui. Longtemps, cet animateur dans des centres de jeunesse a préféré mettre son chagrin dans les mots des autres. Ceux de Patrick Bruel ou de Jean-Jacques Goldman, ses idoles.
Un jour d’hiver 2003, pourtant, « Olive » a «tout fait péter ». Trop de questions. Trop de silences qui pèsent sur l’estomac. Il s’est rendu dans le village de Sarceaux. Il a sonné au presbytère, mais personne n’a ouvert. De sa besace, il a sorti une liasse de feuilles dactylographiées, qu’il a glissées dans les boîtes aux lettres des habitants. Il a aussi placardé la missive sur l’Abribus et la vitrine du coiffeur, en ramassant un peu de neige sur le trottoir pour coller le tout. « Ceci n’est pas une publicité, juste un message d’un homme en colère », disait la curieuse épître aux paroissiens. Le message ? Olivier révélait que le curé du lieu était son père ainsi que celui de ses deux soeurs. En post-scriptum, il avait inséré la photo de trois charmants bambins se tenant par la main. Trois orphelins. « Je n’ai pas agi par vengeance, je voulais juste que ça se sache avant que mon père ne meure. »

Il a réussi son coup. Ardisson, Delarue, toutes les stars de la télé ont réclamé sur leur plateau ce fils de cureton aux manières de corbeau. Mais « Olive » a décliné les invitations. Aujourd’hui, il veut bien se confier. « Ma mère me répétait: Je ne peux pas te parler de ton père. Elle m’avait juste lâché son prénom, une fois, en voiture, se souvient-il. Mais moi, je me demandais sans cesse qui était cet homme. Il ne pouvait pas être mort, puisqu’on n’allait jamais à la Toussaint sur sa tombe. Il était peut-être en prison, mais on n’allait jamais le voir. » A l’école, le garçon trace un trait sous la rubrique « profession du père ». «Il y avait toujours un prof pour me demander pourquoi je n’avais rien mis. » Le lundi, ses copains racontent les parties de foot avec papa. Lui n’a rien à dire.

Un jour, Olivier fouille dans les papiers de son grand-oncle, un prêtre décédé, à la recherche de documents sur la Seconde Guerre mondiale. Soudain, il tombe sur une lettre. L’homme d’Eglise savait, depuis la naissance de la soeur d’Olivier, qui était leur père à tous les deux. Dans sa lettre, l’aïeul révèle à l’évêque de l’époque que son petit-neveu et sa petite-nièce sont les enfants de l’un des curés du diocèse. « Je suis resté à genoux dans la cave de ma grand-mère », raconte Olivier. Il a alors 20 ans. « Je sais qui vous êtes », écrit-il à son géniteur. Celui-ci lui donne rendez-vous par lettre dactylographiée, non signée, près de l’église de Caen. Les retrouvailles tournent court. « Il m’a affirmé que personne ne savait, alors que j’avais la preuve que l’évêché était au courant. » Va-t-on encore lui mentir longtemps? Olivier se cabre. Les années filent. « Je n’arrivais pas à comprendre comment mon père pouvait supporter cette double vie. Pour moi, un prêtre, c’est quelqu’un qui est censé dire aux gens ce qui est bien ou mal. »

Après l’épisode des boîtes aux lettres de Sarceaux, le religieux octogénaire a pris sa retraite et reconnu sa progéniture. En « papy » tombé du ciel, il assiste aux réunions de famille et offre des cadeaux à ses petits-enfants. « Je ne lui en veux pas, j’ai gagné un père, dit Olivier, mais pour moi, il aura toujours fait le mauvais choix en nous préférant ses fidèles. » Le choix d’une vie en clair-obscur, où la fidélité à une institution qui préfère le silence au scandale fabrique aussi beaucoup de malheur.

L’Express 2005

Les convictions des Chrétiens du Vaucluse contre les options du Front National

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Manifeste des « Chrétiens en Vaucluse » à l’occasion des élections de 2017

Devant les tentations de repli et de quête identitaire qui se manifestent dans notre département et qui séduisent de plus en plus de chrétiens, nous Chrétiens en Vaucluse, nous prenons la parole pour alerter sur les risques que ces tentations font courir à notre société. Nous témoignons que la diversité de ceux qui la composent peut être une chance et une richesse si nous choisissons l’ouverture au monde, la solidarité et le partage, l’écoute de l’autre et le dialogue, le souci des plus fragiles et la fraternité.
Notre confiance s’enracine dans notre foi, celle de l’Église avec laquelle nous sommes en communion dans sa recherche de fidélité à la parole du Christ : « J’ai eu faim, j’ai eu soif, j’étais un étranger, j’étais nu, malade, en prison et vous êtes venus jusqu’à moi… En vérité, je vous le déclare, chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait (Mt 25.). »
Elle s’appuie également sur la conviction que mentalités, cultures et religions peuvent coexister et s’enrichir mutuellement de leurs différences et que notre avenir, et celui de notre pays, dépend de notre capacité à construire une vie ensemble. Comme l’ont souligné les évêques de France récemment : « « Qu’on le veuille ou non, notre société est devenue multiculturelle. »

1. Nous constatons que le vote FN est souvent lié à des peurs, (sentiment d’abandon et d’injustice, insécurité, voire désespoir) …

  • Peurs réelles : peur de tomber dans la pauvreté, peur des difficultés économiques, peur du chômage. Malaise devant le statut de la femme chez certains musulmans ;
  • peurs fantasmées : par méconnaissance de l’Islam et manque de contact avec des musulmans. Crainte de « l’invasion » avec la multiplication visible des foulards et l’ignorance des nombres réels. On entend : « On n’est plus chez nous ».

et à des précarités réelles :

  • En PACA, la pauvreté est particulièrement prégnante. Le départmet du Vaucluse est le plus touché. Avignon est la première grande ville avec 29% des habitants pauvres, dont la moitié vit avec environ 764 euros par mois. Les communes de Carpentras, Cavaillon, Apt, sont dans le peloton des villes les plus pauvres. Le département de Vaucluse a le plus fort taux de chômage de la région (13 %). Les pouvoirs publics sont en panne de politiques volontaristes pour réduire les inégalités territoriales (rural/urbain, quartiers riches/quartiers pauvres). Un Plan local pour l’insertion existait depuis 22 ans sur le grand Avignon, il vient d’être abandonné sans qu’un autre dispositif ait été proposé.

Dans le même temps et sur ce terreau, le vote Front National a prospéré et atteint des scores très lourds:

  • En 2015, aux élections régionales, 51,28% des voix se sont portées sur le Front National avec des sommets jamais atteints dans les villes principales du département ;
  • Les discours et les actes de rejet de l’étranger, de peur de l’autre, de renfermement sur soi, de renvoi dos à dos des personnels politiques, se multiplient ;
  • Les plus exclus y trouvent les causes et explications de leurs malheurs ainsi qu’une façon d’abattre « le système ». Les mieux installés ou plus nantis y trouvent une façon de se justifier pour renforcer des protections contre tout ce qui est différent et dérangeant.

Pour certains, un monde semble s’écrouler. La tentation est grande de se livrer entre les mains de ceux qui, jouant de cette situation de crise, renforcent les peurs et promettent des solutions radicales.

2. L’extrême droite (dont le Front National FN) avance ses solutions :

Devant les changements en cours dans notre société, les stratégies de l’extrême-droite (et notamment le FN) visent :

  • à exacerber les peurs, en s’emparant de tout événement pour grossir les « périls » et prédire la catastrophe :Un article de Paris-Match a fait grand bruit en stigmatisant un quartier entier d’Avignon. Il affirmait que les autorités y toléraient le règne du salafisme sur la population massivement prise en otage.
  • L’annonce de l’installation par la préfecture de 30 demandeurs d’asile dans un lieu isolé du Vaucluse a provoqué des communiqués incendiaires sur les dangers potentiels encourus par la population, les femmes, les enfants, etc.
  • à simplifier les analyses jusqu’à la caricature :méconnaissance de l’Islam, dont on ne retient que quelques aspects grossiers « religion de la violence et de la soumission » ;
  • théories abusives sur la démographie, pour annoncer le « grand remplacement », l’« invasion » menaçante d’étrangers ;
  • refus de collaborer avec nos voisins européens, arguant des défauts de la construction européenne actuelle ;
  • critique du « laxisme » de tous les éducateurs et des juges ;
  • accusation des hommes politiques qualifiés de « tous pourris » ;
  • critique des media.
  • à annexer des traditions culturelles et religieuses du passé, pour en faire le socle d’une restauration de l’ordre social, ancré sur la soumission à l’autorité, le rejet du dialogue et des évolutions modernes. La religion catholique en particulier est instrumentalisée.

La députée du Vaucluse, Marion Maréchal Le Pen, se présente comme chrétienne « pratiquante » ; elle déclare approuver la « Doctrine Sociale de l’Eglise » ; de celle-ci elle ne retient que l’interdiction de l’avortement (qui ne fait pas partie de ce qu’on définit par Doctrine sociale de l’Eglise) et en néglige le fonds. Elle rejoint ainsi un courant présent depuis longtemps dans le Vaucluse, qui croit avoir trouvé dans ce parti un défenseur efficace de la foi chrétienne et des pratiques catholiques d’avant Vatican II.

Même lorsqu’ils sont conscients et inquiets de ces dérives, beaucoup de responsables politiques et religieux locaux se réfugient dans le silence face à ces affirmations et comportements de l’extrême-droite. Certains craignent, en prenant la parole, de donner à cette mouvance, une raison supplémentaire de déployer sa propagande et de développer l’inquiétude. Et surtout, prendre position clairement sur les sujets sensibles (sécurité, droits des personnes, accueil des migrants) risquerait de faire perdre des voix ou des pratiquants.

3. Face à ce constat nous disons NON aux divisions, et nous prenons le risque de l’espérance :

Face aux déséquilibres mondiaux, nous souvenant que les Pères de l’Europe étaient des chrétiens engagés, nous ne pouvons pas aujourd’hui fermer nos portes et renier les valeurs d’accueil et de fraternité auxquelles nous sommes attachés.
Nous savons que des chemins existent et nous voulons témoigner d’un certain nombre d’initiatives pleines d’humanité, où croyants et non-croyants se côtoient pour apprendre à vivre ensemble.

Á l’école :

En 2016, la Mairie de Caumont sur Durance, la Bibliothèque et l’école primaire proposent en partenariat un atelier d’écriture pour sensibiliser les CM2 à la poésie contemporaine. Les enseignants et des bénévoles, apportent leur concours à cette action ; cette collaboration redonne tout son sens à la notion de communauté éducative. Autour du thème Vivre ensemble, les élèves livrent dans leurs écrits leur quotidien imaginé et vécu. Ils se font l’écho de l’actualité immédiate : attentat de Paris, attentat de Bruxelles, la laïcité, le racisme, le racket, la violence, la peur, la solitude. Comment vivre sans avoir peur les uns des autres ?
Á la salle des fêtes, lorsque chaque enfant, devant la communauté du village, donne voix et réalité aux textes qu’il a composés, il accomplit un acte citoyen. Il dit tout haut qu’il refuse le rejet, les violences, le racket, qu’il veut accepter les différences.

L’accueil des demandeurs d’asile :

À Carpentras : pour l’accueil de 25 demandeurs d’asile, un collectif est créé, composé de différentes associations et de membres individuels bénévoles. Avant leur départ vers les CADA, les jeunes accueillis ont souhaité faire une fête qui a réuni près de 300 participants ; ils l’ont animée de leurs chants et danses et avaient préparé une partie du repas. « Merci la France! » ont-ils clamé en partant.
Lors du Conseil municipal le 27-9, un élu FN (catholique pratiquant) propose une motion  » pas de migrants dans ma commune » que le Maire se refuse, heureusement, à mettre à l’ordre du jour.
À Avignon : en 2015, 300 personnes à Avignon répondaient à l’appel de la mairie pour recevoir des réfugiés.
L’accueil des demandeurs d’asile, venus principalement de pays en guerre, s’organise en Vaucluse. L’ADOMA, en regroupe plus de 100. Des accompagnateurs socioprofessionnels agissent au quotidien pour suivre et orienter les accueillis, afin de faciliter leur intégration dans notre société, avant l’obtention du droit d’asile à l’issue de leur parcours. Cet accompagnement se fait en lien avec diverses associations vauclusiennes, pour l’enseignement du français, les démarches administratives etc… D’autres associations, Welcome, Habitat et Humanisme, portent le même souci de l’accueil.
À Apt : le Conseil pastoral a organisé un goûter pour connaître les réfugiés syriens nouvellement arrivés.

Les activités culturelles :

À Avignon : des rencontres interculturelles ont eu lieu, ainsi que des rencontres festives avec des jeunes dans un quartier sensible
Des théâtres scolaires ont créé en 2015 des spectacles qui ont pour thème la joie de vivre ensemble entre jeunes de diverses origines, dans un esprit de fraternité, de liberté, d’égalité.
Le cinéma Utopia accepte de projeter des films à la demande d’une équipe de Cinéchange qui réunit pour des débats un public nombreux de divers horizons culturels entre personnes qui ne se rencontrent jamais : femmes maghrébines, anciens SDF, personnes handicapées, étrangers, personnes seules, en précarité ou non.

Le développement des liens de voisinage :

À Avignon : l’opération « Mosquées ouvertes », en janvier 2016, a mobilisé largement un public intéressé, qui a été frappé par la générosité de l’accueil.
Trois soirées ont eu lieu au presbytère St Ruf en 2016, pour une rencontre entre des habitants du quartier de milieux et de religions différents. Des paroissiens, dont quelques jeunes, ont assuré un accueil très chaleureux pour un repas partagé par 50 personnes. Un responsable musulman et un prêtre ont lancé le débat, avec comme objectif de creuser les 3 devises de notre République : Fraternité – Egalité – Liberté. Une ou deux questions guidait les échanges. Une mise en commun clôturait la soirée. Une belle réussite !
À Apt : participation importante de la paroisse aux journées Portes Ouvertes de la mosquée. En retour, les musulmans ont été accueillis pour une visite commentée de la cathédrale et un concert d’orgue.

Les rencontres interreligieuses :

À Avignon : depuis 20 ans, l’association DIRE (dialogue interreligieux) organise des échanges, des conférences, des visites réciproques entre chrétiens, bouddhistes, musulmans…
La Nuit des Veilleurs : à l’occasion de la journée internationale de soutien aux victimes de la torture, le groupe de l’Action des chrétiens pour l’Abolition de la torture (ACAT) d’Avignon a organisé un rassemblement silencieux sur la place Pie auquel environ 90 personnes de toute sensibilité religieuse ont participé dans le recueillement.
À Apt : après les attentats de Charlie, un texte commun aux représentants des catholiques, protestants et musulmans a été lu par l’imam à la mairie.
Une délégation de musulmans a participé à l’hommage rendu au P. Hamel lors de la messe des fêtes de la Sainte Anne.

Connaissance des autres religions :

Connaissance de l’Islam et du judaïsme: le CERCÁ (Centre d’Etudes et de Réflexion Chrétiennes d’Avignon) propose deux séries de rencontres à toutes les personnes intéressées par la formation et l’approfondissement du dialogue inter religieux:

  • sur la culture juive: découverte de la Torah, l’histoire du peuple juif, de sa pensée, et une initiation à l’hébreu biblique ;
  • sur  » Les visages de l’Islam de France » avec la contribution d’imams et de croyant (es) musulmans du Vaucluse

4. Conclusion :

Les réflexions et les témoignages que nous proposons ici sont le fruit d’un travail collectif, dans un esprit de dialogue et d’ouverture. Ils ne prétendent pas à l’exhaustivité car ils s’appuient sur notre expérience locale, concrète, vécue dans les communes, les paroisses, les écoles, les associations, dans ces rencontres avec d’autres cultures, d’autres religions qui tissent notre vie quotidienne.
C’est tout cela que nous voulons faire connaître le plus largement possible autour de nous. Car nous pensons que cette réflexion peut nourrir un mouvement plus vaste et rencontrer des échos au-delà du Vaucluse, dans toute la France.
C’est pourquoi nous lançons un appel à toutes les communautés chrétiennes, aux associations diverses, aux chrétiens et, plus largement, à tous ceux qui le souhaitent, pour qu’ils témoignent avec nous à partir de leurs initiatives locales que le refus des différences et le repli sur soi que défend l’extrême-droite ne sont pas des solutions. Au contraire, nos expériences de partage et de vie ensemble sont les véritables germes d’un monde nouveau qui se construit pas à pas vers une fraternité à laquelle nous croyons que tous les hommes et les femmes de toutes origines sont appelés.

Chrétiens en Vaucluse regroupe depuis 2009 des chrétiens qui réfléchissent et agissent dans un diocèse en difficulté.
Renseignements et contact :
http://chretiens-en-vaucluse.com

Monique MORVAN 04 90 31 06 84
Joseph PACINI 06 90 23 09 12

Le Pape François rend visite à des familles de Prêtres mariés

Publié le

Le Pape Francois visite sept anciens prêtres mariés et leurs familles

Le témoignage d’un ancien pasteur: «

« J’ai goûté le goût de l’Évangile »
François chez les PM

11 Novembre 2016 Le Pape François chez des PM

Le pape va réconforter des anciens prêtres qui ont commencé une vie de famille.
Laissant la Casa Santa Marta, il y est parti cet après-midi du 11 Novembre 2016 à 15h30 pour se rendre à Ponte di Nona, un district extrême de la périphérie de Rome-Est. Dans un appartement, le Pontife a rencontré sept familles, toutes formées par des jeunes qui ont quitté le sacerdoce au cours des dernières années. Pape Bergoglio, dit le bureau de presse du Vatican, a voulu offrir un signe de proximité et d’affection à ces personnes qui ont fait un choix pas souvent partagé par leurs frères prêtres et leurs familles.

Après différentes années dédiées au ministère sacerdotal, dans les paroisses, il est arrivé que la solitude, l’incompréhension, la fatigue face au grand engagement de responsabilité pastorales ait mis en crise le choix initial du sacerdoce. Se sont donc succédés des mois et des années d’incertitudes et de doutes qui les ont amenés souvent à penser avoir fait, avec le sacerdoce, le mauvais choix. D’où la décision de laisser le presbytérat et de former une famille.

Parmi ces sept jeunes ayant quitté la prêtrise, figurent quatre anciens curés de diverses paroisses de Rome, les trois autres : un de Madrid et l’autre d’Amérique latine, résidant à Rome, tandis que le dernier est de la Sicile.

Cette rencontre est la dernière dans le cadre du « Vendredi de la Miséricorde» que le Pape a voulu chaque mois tout au long de l’année jubilaire.

Le témoignage d’un ancien pasteur: «J’ai goûté le goût de l’Évangile »
L’entrée du Pape dans l’appartement a été marquée par un grand enthousiasme : les enfants se sont regroupés autour du Pape pour l’embrasser, pendant que les parents n’ont pas retenu leur émotion. La visite du Saint-Père a été très appréciée par toutes les personnes présentes, qui n’ont pas senti un jugement du Pape sur leur choix, mais sa proximité et l’affection de sa présence. Le temps est passé vite : le Pape a écouté l’histoire de chacun et a suivi avec attention les considérations qui lui étaient faites concernant les développements des procédures juridiques pour ces différents cas. Il les a tous assurés de son amitié et de son attention.

De cette façon, « encore une fois, Francis a voulu donner un signe de la miséricorde à ceux qui vivent une situation de malaise spirituel et matériel, en mettant en évidence l’exigence que personne ne se sente privé de l’amour et de la solidarité des pasteurs. La visite s’est conclue vers 17h20. Puis le Pape est retourné au Vatican. »

Significative  est cette entrevue, dit l’un des anciens pasteurs rencontré aujourd’hui par François. « La nouvelle m’a pris par surprise, je l’ai découverte il y a quelques jours. Et la surprise, c’est que le pape soit préoccupé par nous ! « Papa Francesco – a ajouté Andrea Vallini – n’est pas un simple évêque. La première sensation était quelque chose de purement évangélique. En général, ce sont les pécheurs qui vont à la rencontre du Seigneur ; aujourd’hui c’était le contraire. Je goûtais une saveur très agréable, du pur évangile ! Le pape a une capacité de relier vraiment engageante « .

« Dans certains cas, il n’y aurait pas besoin de guérir les blessures – dit Andrea – mais toutes les situations maintenant présentes étaient déjà tout à fait guéri. Cette visite, je ne sais pas si elle ouvre de nouvelles perspectives. Je comprends que le pape a été particulièrement étonné que certains d’entre nous, en particulier l’italien, aient ressenti très fort une certaine exclusion. Dans son expérience, il nous a dit qu’il n’a jamais exclu des situations particulières. Il nous a dit que son président de Caritas à Buenos Aires était un ancien prêtre qui a fait un excellent travail « .

« Je souhaite que à l’exemple du Pape – dit Andrea – tout en ayant des histoires différentes, nous puissions continuer à être une ressource pour l’Église. Nous aimerions tous de continuer à être utile à la communauté chrétienne, il serait bon de dépasser les clôtures. D’autre part, ainsi que d’avoir le caractère sacerdotal, qui ne sont pas effacées, nous sommes baptisés. Ce serait bien de continuer à faire le bien, comme je me suis efforcé de le faire sous une autre forme  »

« C’est un « vendredi de la Miséricorde » que je n’oublierai jamais !
Ce geste du pape François, totalement inédit auparavant, est un signe indubitable d’une ouverture libérale sur la question du célibat des prêtres. Le pape ajoute un nouveau chapitre à la réforme ultra-progressiste qu’il est en train de promouvoir à l’intérieur de l’Église officielle, déjà pourtant bien progressiste et moderniste depuis la révolution du concile Vatican II. Cependant, comme toute révolution, il faut toujours aller plus loin, évoluer vers un progressisme indéfini et infini…

Avec François l’argentin, cette révolution en marche constante est basée sur une pastorale innovante et une communication médiatique à outrance. Ce sont les deux mamelles de la praxis bergoglienne pour changer radicalement l’enseignement catholique, dans la continuité de Vatican II, les actes d’un pape ayant un impact sur les consciences plus fort que celui d’une quelconque autre autorité, laïque ou religieuse.

A pape révolutionnaire, méthode révolutionnaire ! Pour transformer tout doucement, suavement, les mentalités, et ainsi permettre à une nouvelle doctrine, sur le célibat des prêtres dans le cas d’aujourd’hui, de s’ériger et d’être acceptée par des fidèles catholiques…

Dans le vendredi précédent de la Miséricorde, le Pape a visité une maison de soins infirmiers pour les personnes âgées et les malades dans un état végétatif (15 Janvier); une communauté pour les toxicomanes à Castelgandolfo (26 Février); Centre d’accueil pour les réfugiés (Char) de Castelnuovo di Porto (24 Mars, Jeudi Saint, avec lavement des pieds); conjointement avec le patriarche Bartholomée et archevêque orthodoxe d’Athènes Ieronimus, les réfugiés et les migrants sur l’île de Lesbos (Grèce, le 16 Avril); communauté de « Chicco » pour les personnes souffrant de troubles mentaux graves (Ciampino, le 13 mai); communauté « Monte Tabor » qui abrite les prêtres qui souffrent de diverses formes de malaise et des communautés de prêtres âgés du diocèse de Rome ( « Casa San Gaetano », le 17 Juin); prière silencieuse à Auschwitz-Birkenau (Pologne) et les enfants malades à l’hôpital de Cracovie pédiatrique, le Chemin de la Croix de la Journée mondiale de la jeunesse avec les jeunes Irakiens et ceux qui vivent des situations particulières de détresse (29 Juillet); groupe d’anciennes prostituées femmes (Rome, Pietralata) – Projet de récupération communautaire Jean XXIII fondée par Don Oreste Benzi (12 Août); à Rome deux hôpitaux pour souligner l’importance de la vie de son commencement jusqu’à sa fin naturelle: les premiers secours et la néonatologie à San Giovanni à Rome et l’hospice « Villa Speranza » (terminale Les patients malades), la structure Fondation de l’Université catholique Gemelli du Sacré – cœur (16 Septembre); « SOS Children Village », dans le quartier Boccea, une maison de famille qui accueille les enfants sur la recommandation des services sociaux et de la cour, dans les difficultés personnelles, familiales et sociales (14 Octobre).

D’après 2 reportages de Domenico Agasso JR  et de Francesca de Villasmundo

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